
Le magazine Illico menacé Intimidation et atteinte à la liberté d’expression entre les deux tours
Le « gratuit » gay Illico est fallacieusement menacé par le Ministère de l’Intérieur.
Dans une lettre datée du 20 avril, la veille du premier tour de l’élection présidentielle, le “sous-directeur des libertés publiques et de la police administrative” affirme que « cette revue présente des textes et des photographies de nature pornographique susceptibles de choquer les mineurs qui pourraient l’acquérir ». Il ne menace de rien moins que de l’application de l’article 14 de la Loi sur les publications destinées à la jeunesse qui permet au ministre de l’intérieur d’en interdire la publication.
Or Illico est un gratuit —financé par la publicité— disponible dans des lieux LGBT, tous réservés aux personnes ayant atteint leur majorité sexuelle. Il n’est nullement disponible en kiosque et la seule manière de l’acquérir est par correspondance, où l’on a besoin d’un mode de paiement par chèque ou par carte, réservé aussi aux personnes majeures.
Mais surtout, ouvrez le site ou un numéro d’Illico, vous verrez certes des photos suggestives dans les publicités ou la chronique des sorties de films pornographiques (légaux), mais vous aurez surtout une excellente rédaction qui aborde toutes les questions LGBT et au delà : société, culture, politique, actualité internationale, etc.
Pour nous, gays, lesbiennes, bisexuels et transexuelLEs, depuis plus de 20 ans, Illico a joué un rôle fondamental dans la construction de notre identité collective d’aujourd’hui, donnant une vision positive de nos communautés ; permettant notre visibilité ; nous accompagnant à la sortie de la honte et du secret ; participant constructivement dans des débats de société comme le PACS, l’homoparentalité ou la lutte contre l’homophobie ; faisant découvrir la richesse, la diversité et l’ancrage au monde de la culture LGBT ; couvrant chaque année les Marches de la fiertés LGBT dans le monde —qui ont réuni, rien qu’à Paris, plus d’un million de personnes dans les rues— ; informant sur les faits et les positions politiques sur les questions LGBT en France et dans le monde ; ...
Sans surprise du pouvoir en place, cette menace s’exerce contre un magazine indépendant de la communauté, et non contre des publication commerciales de grands groupes, certaines vraiment et uniquement pornographiques, dégradantes de l’image de la personne, et qui s’affichent sans souci dans l’espace public. En 1987 déjà, le ministre de l’intérieur de l’époque, Charles Pasqua, faisait interdire le magazine Gai Pied. La menace est donc sérieuse. L’intimidation et la répression qui prétend s’attaquer aujourd’hui aux droits des gays, des lesbiennes, des bis et des trans, sont les mêmes qui s’abattent continuellement sur toutes celles et ceux qui veulent défendre des convictions minoritaires, ceux et celles qui veulent conforter les droits des plus faibles. Les peuples autochtones qui tiennent à leur identité, les exclus du monde économique qui ont droit au partage des richesses, les étrangers obligés de fuir la misère ou la répression, la mémoire de tous nos disparus que l’on a fait taire parce qu’ils réclamaient liberté et justice, les femmes qui méritent l’égalité, les enfants envers qui nous avons la dette de préserver une planète durable.
Nous sommes entre les deux tours de la présidentielle en France. C’est une opinion personnelle, donc je crois qu’il n’est pas nécessaire de préciser la candidate qui porte mieux l’espoir de préserver la liberté d’expression que je prétends revendiquer ici.